jeudi 8 avril 2010

Your heart is as black as night



Notre coeur est peut-être noir mais c'est dans du rouge et du bleu que la blonde et jolie Melody accueille son public à l'Olympia.
Moulée dans son tailleur noir puis fatale en drapé nude et escarpins rouges, sa voix, la plus douce de toutes, nous transporte. On pourrait dire qu'elle manque parfois de force et de crescendo mais c'est son univers.

Elle fait de la scène sa maison, en un instant. Y invite ses musiciens, ses amis, ses amusiciens.

Un saxophoniste qui se paye le luxe de jouer de deux saxos à la fois! Pas simplement de l'un, puis de l'autre. Il joue des deux simultanément, becs en bouche manches en mains, et les deux sons s'entremêlent, issus du même souffle, si parfaitement synchronisés. Il alterne de temps en temps avec une flûte traversière ou une clarinette et on s'attendrait presque à le voir sortir une trompette de ses poches!

Pendant ce temps là, le contrebassiste fait danser son instrument comme un charmeur de serpent, comme si cette imposante contrebasse était une bonne amie qui réclamerait tantôt des chatouilles, tantôt des caresses. Et ses sons si graves, si simples, si profonds, me donnent vraiment envie de pleurer. Je les sens frapper à la porte de mon coeur.

Le batteur en chaussettes donne le rythme, je ne retiendrai que son émerveillement devant la belle et le respect qui émane de la façon dont il la regarde chanter.

Deux artistes invités sont venus d'Allemagne et rentabilisent sacrément bien le voyage: un violoncelliste hallucinant de génie, qui joue avec la pédale et les arrangements, la mèche folle lui tombant sur le front, et va même jusqu'à se servir de son violoncelle comme d'une guitare, posé sur ses genoux. Avec lui un guitariste plus discret, et les deux se lancent dans des duels de génie sans fins.



Melody Gardot, elle, veut bouger et ce n'est pas sa canne discrète qui l'en empêchera. Elle nous parle de la prison mais on sent bien que sa prison c'est son corps et on voudrait l'aider, la soutenir par nos applaudissements.

Elle veut tout maîtriser de la chorégraphie des instruments mais est désarmante quand elle oublie les notes de l'un de ses morceaux, essaye de les retrouver puis se réinterromps, n'y arrive pas et s'excuse bien trop. Comment en vouloir à cette voix et à ce talent?

Elle veut nous faire rigoler dans un français au délicieux accent américain. Et elle y réussit. La Melody joue la comédie. J'imagine qu'ils ne doivent pas s'ennuyer, en tournée avec un numéro pareil.

Est-il besoin de préciser qu'on passe un excellent moment, sourire aux lèvres et tête dodelinante, talon tapant la mesure et claquements de doigts essayant de la suivre. La maison de Melody est un havre. Elle chante "Birds may cease to spread their wings" et on jurerait entendre le chant des oiseaux.

On regrette simplement qu'elle n'ait pas enlevé ses lunettes (noires) pour nous montrer ses yeux (...bleus?). Ainsi, le véritable mystère de l'âme demeure.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire